La famille Piccard, 3 générations de savanturiers explorent le monde

Trois générations de savanturiers

Dans la famille Piccard, je voudrais le grand-père !

Voici Auguste (1884 – 1962), le physicien, dont Hergé s’inspira pour créer le professeur Tournesol, et qui en 1931, s’éleva en ballon jusqu’à 15 781 mètres, devenant ainsi avec son coéquipier Paul Kipfer le premier homme à atteindre la stratosphère et à voir la courbure de la Terre.

Dans la famille Piccard, je voudrais le père !

Voici Jacques (1922 – 2008), l’océanographe et écologiste avant l’heure, qui en 1960 descendit avec le bathyscaphe conçu par son père au fond de la fosse des Mariannes, à 10 916 mètres, où il put constater de ses yeux la présence de la vie.

Dans la famille Piccard, je voudrais le fils ! 

Et voici Bertrand, né en 1958, aéronaute et pionnier des technologies propres, qui réalisa le premier tour du monde en ballon sans escale avant de lancer le projet Solar Impulse et de faire le tour du monde à bord d’un avion solaire.

Un, deux, trois Piccard ! Dans la famille des « savanturiers », le compte est bon !

L'histoire

À travers trois générations, Jean-Yves Duhoo nous raconte dans cet album un siècle de sciences, d’explorations, d’exploits et d’émotions ! Grâce à la complicité bienveillante et généreuse de Bertrand Piccard qui lui a ouvert les archives de son père et de son grand-père et lui a fait ressentir l’esprit familial grâce à quelques anecdotes savoureuses, l’auteur a pu tisser la chronique intime de ces trois explorateurs et la faire résonner avec la grande Histoire. Un, deux, trois Piccard fait aussi bien sûr la part belle à la technologie. Jean-Yves Duhoo met tout son savoir-faire de vulgarisateur scientifique pour nous donner à voir et à comprendre les différentes machines inventées par ces trois héros. Un album pour toute la famille, instructif, savoureux, et qui donne envie d’aller au bout de ses rêves…

Entretien avec Bertrand Piccard et Jean-Yves Duhoo

Vous ne vous connaissiez pas quand vous vous êtes lancés dans ce projet. Quelles étaient vos envies, vos attentes, vos craintes, à chacun ?
 

Jean-Yves Duhoo : Quand Dargaud m’a proposé de travailler sur ce projet, je connaissais surtout le travail de Bertrand Piccard, son tour du monde en ballon sans escale et l’aventure de Solar Impulse. Mais je connaissais moins les exploits de son père et de son grand-père. Je me suis plongé dans leurs livres et c’est une histoire si passionnante que j’ai tout de suite été partant. Mais il me restait une question : est-ce que Bertrand n’allait pas être trop intrusif, à vouloir tout contrôler, à me reprendre sur chaque détail ? Mais dès notre première rencontre, le feeling a été très bon et j’ai été rassuré.

Bertrand Piccard : Je me souviens très bien de ce jour-là. Moi aussi j’avais un peu peur de ce que j’allais découvrir. Jean-Yves avait déjà accompli un travail de documentation impressionnant. Il m’a montré ses dessins et j’ai trouvé que c’était exactement ce qu’il fallait pour une bonne vulgarisation scientifique : méticuleux mais simple, pas surchargé de détails.

J.-Y. D. : C’est vrai que je réunis énormément de documentation. J’essaie de tout comprendre du fonctionnement des machines. C’est lié à ma passion d’enfance pour le bricolage. J’adorais fabriquer des véhicules et des vaisseaux avec du bois, du carton et de la colle ! En fin de compte, mon dessin est bien loin de la précision photographique. Parfois je me demande si j’ai vraiment besoin d’accumuler tant de connaissances pour ce que je vais en restituer. Est-ce que ce n’est pas un peu névrotique ? Il faudrait qu’on en parle plus longuement avec Bertrand qui est psychiatre !

B. P. : Haha ! Tout ce que je peux dire, c’est que même si le dessin est très lisible, il est juste. Et cela vient de la compréhension qu’à Jean-Yves de ce qu’il dessine. Mais quand j’ai été rassuré sur cet aspect technique, ma question à moi, c’était : « Comment va-t-il réussir à transformer tous ces éléments en un scénario, et à donner à cette histoire du souffle, de l’émotion, de l’humour… Et surtout, allais-je reconnaître mon histoire familiale, ou bien m’en sentir dépossédé ? »

Et alors ?

© Solar Impulse / Fred Merz

B. P. : Quand j’ai reçu les premières planches quelque temps plus tard, j’ai été totalement enthousiasmé ! Il avait réussi à prendre une distance avec toute la documentation qu’il avait emmagasinée et à se lâcher complètement. Alors que je connaissais évidemment toute l’histoire qu’il racontait, je suis passé du fou rire devant certains dessins aux larmes, en découvrant certaines séquences. Je pense à la mort de mon grand-père, racontée de manière extrêmement subtile. Ou aux deux pages de dialogue entre ma mère et moi, qui montrent comment je suis d’abord devenu explorateur du monde intérieur – les émotions, la sensibilité, la conscience…

Jean-Yves Duhoo, comment avez-vous construit cette histoire ?

J.-Y. D. : La chronologie des inventions et de la vie des trois personnages sert de toile de fond. Mais l’humanité qu’évoque Bertrand est venue tout naturellement à mesure que je me laissais toucher par les personnages. On se rend bien compte qu’il y a eu des moments où les choses leur ont échappé, où ils faisaient face à de l’adversité.
Les parallélismes sont même parfois étonnants : tous les trois, on a voulu les déposséder de leurs inventions ou les tenir à l’écart des aventures qu’ils initiaient… Mais bien sûr, il y a aussi des différences entre eux. Il y a des moments de grandes réussites, des embûches, et des moments poignants.

Bertrand Piccard, quelles sont ces différences d’après vous ? Sont-elles bien traduites dans l’album ?

B. P. : Pour mon grand-père puis mon père, la technologie était la chose la plus importante, une fin en soi. La seule émotion que mon grand-père a racontée, c’est celle qui l’a saisi quand il était dans la stratosphère, devant la beauté du ciel bleu foncé. Mais sinon, l’émotion n’était jamais mise en avant. Chez moi, c’est l’inverse. La technologie est un moyen d’aller plus loin dans l’exploration de sa vie intérieure, de ses peurs ou de ses enthousiasmes quand on se confronte à ses limites ou à l’inconnu. J’ajoute à cela la place qui était réservée aux femmes. Ma grand-mère et ma mère étaient des épouses et des mères qui restaient à la maison. Tandis que ma femme Michèle s’investit pleinement à mes côtés au sein de l’équipe pour les aventures que je mène. La BD se termine d’ailleurs sur notre travail commun de promouvoir les solutions qui permettrait d’améliorer l’état du monde.

Il y a beaucoup de clins d’œil à Hergé et à Tintin dans cette histoire...
B. P. : Bien sûr ! Parce qu’Auguste Piccard a servi de modèle pour le professeur Tournesol. Hergé le croisait parfois dans les rues de Bruxelles sans oser l’approcher. Pour lui, c’était l’archétype du savant obnubilé par ses recherches, qui gardait sa cravate pour monter dans la stratosphère… La différence entre les deux, c’est que mon grand-père était très grand. Hergé disait que s’il avait gardé cette caractéristique, il aurait dû agrandir ses cases… Tournesol est donc un mini Piccard.

J.-Y. D. : Je me suis amusé à glisser quelques références, en essayant de rester discret. Les amateurs de Tintin reconnaîtront ici ou là quelques citations graphiques. Quand on voit Jacques en parade dans les rues de Washington, par exemple, c’est du Tintin !
Mais parfois, mes références sont involontaires, tant les images d’Hergé font partie de mon imaginaire. Comment dessiner un cargo des années 1940, sans faire celui du capitaine Haddock ?

Lire en ligne

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Bonne lecture !