Interview de Philippe Thirault et Steve Cuzor

Par l'équipe Dargaud

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Bonne nouvelle pour le début d'année 2009 : une nouvelle série de grande aventure voit le jour. O'Boys est l'histoire de deux jeunes hommes, Huck et Charley, qui fuient leur famille et leur condition miséreuse pour partir à l'aventure à travers les Etats-Unis des années 1930. Les dialogues percutants de Philippe Thirault, le dessin si vivant de Steve Cuzor et les couleurs sublimes de Meephe Versaevel font de ce récit à la Mark Twain un album touchant et attachant.

 Les deux auteurs nous en disent un peu plus sur ce premier tome, qui paraîtra le 9 janvier prochain...

 

 Pourriez-vous vous présenter en quelques mots afin que l’on connaisse un peu mieux votre parcours dans la BD… et ailleurs ?

 


 P. Thirault : Au moment de la sortie de O’boys, cela fera dix ans que mon premier album a été publié. Vingt-cinq autres ont suivi, grâce à des éditeurs et des lecteurs qui eux aussi m’ont suivi. Sinon je suis quelqu’un de casanier qui voyage grâce à ses propres histoires.

S. Cuzor : C’est drôle, car mon premier livre en tant qu’auteur complet, est également sorti il y a 10 ans, en novembre 1999. Je démarrais alors la série Black Jack chez Casterman. Six autres ont suivi, avec O’Boys ça fera sept. On dit que c’est l’âge de raison… J’ai dû passer au travers parce qu’aussi longtemps que je me souvienne, j’ai toujours voulu être cowboy de Rodeo et auteur de Bande dessinée, cowboy je l’ai été jusqu’à l’âge de 25 ans, et j’ai commencé la BD en 1996… Avec ça, vous devez pouvoir trouver mon âge… Tiens, ça me rappelle ces foutus problèmes de maths que me ramène mon môme le soir.

 

 Comment est né ce projet de série ?

 


 S. Cuzor : C’est lié en partie à la tendresse que j’éprouve pour tous ces vagabonds voyageurs et rêveurs qui ont traversé les USA en quête de l’Eldorado. L’Eldorado qui était censé se trouver, à l’époque de la crise de 29, dans l’Etat de Californie. Beaucoup ont déchanté, comme on le sait… Mon souhait, avec Philippe, est de vous raconter leur histoire via deux personnages de la littérature américaine. Ce qui a donné Huck et Charley. Huck le petit blanc maltraité par son vieux, façon Mark Twain, et Charley le noir qui rêve de devenir Robert Johnson à la place de Robert Johnson, quitte à vendre son âme comme l’original. Tous deux cherchent en fait à tuer le père pour devenir quelqu’un dans cette Amérique de la ségrégation.

 

 Comment vous êtes-vous rencontrés ? Comment s’est passée votre collaboration ?

 


 S. Cuzor : Pour ce projet, je recherchais quelqu’un qui sache écrire d’une façon très vivante, très directe, sans concession mais avec beaucoup de poésie. L’humour devait se glisser entre le texte et l’image. Je me suis tourné naturellement vers Philippe dont l’écriture m’avait profondément séduit dans sa série MISS, qui sortait d’ailleurs en même temps que Black Jack à l’époque. La première fois que je me suis présenté à lui, c’était au festival de Blois. Il était assis à une table, seul, en compagnie d’une demi-dizaine de verres vides dont un plein dans la main. Il avait tellement siroté, je crois qu’il n’aurait pas pu se lever de sa chaise. Je me suis dit qu’il fallait que je me mette à niveau et je me suis assis près de lui. Je tenais tellement à le séduire avec ce projet que j’ai dû en parler des heures… Et puis, je n’ai pas pu me relever non plus. Notre collaboration ? Quand on se voit pour bosser, il nous faut deux chaises…

 

Vous, Philippe, l’univers des Etats-Unis des années 30 et des relations entre Blancs et Noirs vous est très familier puisque c’était le cadre de votre première série, Miss (Les Humanoïdes Associés), et vous, Steve, vous avez vécu plusieurs années aux Etats-Unis et vous avez co-signé avec José-Louis Bocquet l’album Lead Belly (Editions Nocturne) sur une figure légendaire et sulfureuse du blues et de la folk.

 

 Que vous ont apportées ces expériences et ces recherches pour réaliser O’Boys ?

 


 P. Thirault : De cette époque aux E.U., seul New-York, et particulièrement Manhattan, m’était familier. Pour O’Boys j’ai donc découvert l’histoire du Delta.

 S. Cuzor : Le projet sur Leadbelly était une demande de ma part à José-Louis, un autre scénariste-dialoguiste qui vous laisse sur le cul. Grâce à lui et à Leadbelly, j’ai pu préparer et anticiper le projet O’Boys. Ensuite mon expérience de cowboy de Rodeo me sert chaque jour pour plein de choses. Et chaque histoire que je raconte est liée aux longs trajets parcourus entre chaque ville pour participer a ces épreuves, aux personnages que j’ai rencontrés sur mon chemin, à l’odeur du bétail dans l’arène, au trac avant de monter un taureau… Mon cœur balance sans hésiter vers Obama, mais l’Amérique que j’ai vécue et que je connais le mieux est celle de Mc Cain. Les choses sont parfois ainsi! Mon rêve de gosse se trouvait parmi ces gens qui manquent parfois (souvent) de culture… C’est aussi cette Amérique-là que racontent les frères Cohen… Avec détachement, humour et tendresse.

 

 Sans rien dévoiler naturellement, pouvez-vous nous parler un peu de la suite de la série ?

 


 S. Cuzor : L’origine du titre O’Boys, vient de l’expression « Oh boys, let’s go ! » qui est une des explications (car il y en a une autre) du mot Hobo. Les vagabonds du rail l’employaient au moment de prendre d’assaut les trains de marchandises. On est dans une période où cette Amérique absurde obligeait ses chômeurs à payer pour chercher du boulot qui n’existait pas. En réponse, les Hobos lui ont montré leur façon de « faire le trimard », de « brûler le dur » au grand dam des compagnies ferroviaires, qui ont fini par leur déclarer la guerre. Les courses-poursuites avec les gardes-frein se terminaient régulièrement sous les roues d’un wagon. Mais rien à faire, pour Huck et Charley, de toute façon, la vie était devant eux… Les embrouilles aussi !

 

 Quels sont vos projets ?

 


 P. Thirault : L’adaptation en BD du « Père Goriot » de Balzac, avec Bruno Duhamel et Thierry Lamy, chez Delcourt (sortie en avril 2009).

 S. Cuzor : Terminer le Tome 2 (n.d.l.r. : de O'Boys) qui s’intitule « Deux Chats Gais sur un train brûlant », et faire une virée dans le Mississippi sur les traces de Huck et Charley.

 

 Que peut-on vous souhaiter pour 2009 ?

 


 P. Thirault : Que plein de lecteurs aient envie de « brûler le dur » en compagnie de Charley et Huck.

 S. Cuzor : Oui, alors, « Brûler le dur », pour un lecteur, ça ne veut pas dire piquer les bouquins en librairie… Hein !

 

 Bon, sérieusement, que la crise de 2009 ne devienne pas la crise de 29. Et que les Editions Dargaud offrent au cinquante millième lecteur un beau voyage dans le Mississippi.

 

 

 Propos recueillis par Delphine Bonardi


 www.dargaud.com

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