Le nouveau duo choc de la rentrée "littérature/BD"

Par l'équipe Dargaud

Après les précurseurs, Druillet / Flaubert, Tardi / Mallet et, ensuite, Ferrandez / Benacquista, Van Cauwelaert/Bonnet, Werber / Mounier, un nouveau tandem, réunissant un écrivain et un auteur de bande dessinée, s’est formé cet automne. C’est celui qui réunit le romancier Patrick Cauvin (dernier titre paru " Pythagore, je t'adore". Il signe également Claude Klotz) et Max Cabanes qui nous proposent (chez Casterman) le début des aventures de Bellagamba, détective (rural ?) malgré lui."Bellagamba", c’est qui ?Patrick Cauvin : C’est un type de la ville qui vit à la campagne. On ne sait rien de son passé. Il a l’air costaud et il l’est.Max Cabanes : C’est un mec qui aurait mieux fait de rester à la ville, pour continuer à vivre peinard, comme il le souhaite. Car, en fait, les emmerdements gisent en nappes phréatiques, à la campagne. Ils sont inépuisables et ils se renouvellent sans cesse. Bellagamba a choisi de régler les problèmes au plus vite, comme tous les paresseux qui aiment avoir du temps libre pour boire un bon vin, en lisant un chouette bouquin et (pourquoi pas ?) faire l’amour. C’est le mec "balèze de chez balèze" et "beau de chez beau". Il ne se sert pratiquement jamais à fond de son potentiel qu’on peut supposer énorme.C’est un polar rural ? Fantastique ?P. C. : Oui et non. On peut croire à une solution surnaturelle, mais ce n’est pas la bonne.M.C. : Pour moi, c’est une ambiance à la X Files, sans Scully et Mulder, sans effets spéciaux, sans la musique et sans le stress toutes les dix secondes. Bref, plutôt une ambiance à la Cauvin-Klotz. "Intelligente de chez détendue".L’idée de travailler ensemble, comment vous est-elle venue ?P. C. : Max m’a sauté dessus. Quand le téléphone est devenu rouge, j’ai dit oui.M. C. : C’est pas du tout ça. Patrick admire tellement mon travail que j’étais obligé de raser les stands au Salon du livre pour l’éviter. Et puis, un jour, j’ai appris qu’il vivait dans un château sur les bords de la Loire. Ça changeait tout. Immédiatement, j’acceptai."Bellagamba", ça sonne sudiste. Vous l’êtes tous deux, l’un, né à Marseille (Patrick Cauvin), l’autre, à Béziers. Vous croyez que cette origine a son importance dans ce que vous faites tous les deux ?PC : Difficile à dire. C’est inconscient. Je préfère raconter des histoires qui se passent à Avignon plutôt qu’à Dunkerque. Question de lumière sans doute.Et vous, Max. Vous pourriez illustrer Simenon ?Pourquoi ? Combien il paye ? (réponse typiquement biterroise).Bellagamba est accompagné de Véronique… Est-il amoureux d’elle ?PC : Certainement puisqu’il ne le lui dit pas. Elle a suffisamment de fantaisie pour qu’il tienne à elle.Et vous, Max. Comment avez-vous trouvé le personnage de Véronique. Devait-elle être blonde, brune, rousse ?J’ai eu un "mal de chien de chez chien" pour la trouver. Pourquoi "blonde acajou", en effet ? Parce que dans la vie, c’est bien connu, ce sont les femmes qui nous choisissent. Elle est donc arrivée un beau jour sur ma feuille, en disant de ses framboisines lèvres : c’est moi et pas une autre et t’as intérêt à la fermer et maintenant tu dessines !Lorsque vous avez vu surgir Véronique sous le crayon de Max, quelle a été votre première réaction, Patrick ?PC : C’était bien elle. Bien balancée et rigolote.Bellagamba, ça sonne aussi très "opéra". Je sais que Patrick en est très amateur. Pourquoi ?PC : L’enfance. Le papa qui chante la Tosca. Même si c’est faux, ça marque et la passion demeure.Et vous, Max ? Pas "opéra" ?M.C. : Comment ça, "pas opéra" ? ! Et pourquoi j’aimerais pas l’opéra ! Parce que je suis de Béziers ? ! À Béziers, c’est l’opéra dans la rue tous les jours. Les voix claironnent, les petites places à platanes se théâtralisent et les verres de pastis servent de partitions aux pétanqueurs. C’est pour ça que je me suis cassé et… que je déteste l’opéra ! (Excuse-moi, beau-papa, toi qui as fait vibrer les murs du Capitole à Toulouse…). C’était quoi la question ?Votre fond musical ?J’écoute tout. La radio, la télé, le fer à repasser, les oiseaux du jardin, Sting, les Fabulous Trobadors, le dernier cédérom de Tino Rossi, l’émission de Ruquier… Je suis un type à l’écoute.Graphiquement, Bellagamba représente une rupture, Max, par rapport à vos albums précédents. C’est une recherche de l’efficacité avant tout ?Exactement. J’ai voulu travailler selon un cadre "classique", resserré. J’ai fait particulièrement attention à ne pas interrompre la fluidité. Colin-Maillard se prêtait à un dessin méditatif, symbolique, à l’évocation d’un temps passé. Bellagamba c’est le présent immédiat, l’action et la réflexion simultanées. Le découpage, les cadrages doivent exprimer cette vivacité en étant sobres et enlevés, ils doivent rendre compte clairement d’une situation. Le dessin doit être comme "empêché", frugal. Partant, il m’apparaît évident que les personnages ne doivent surtout pas "penser à la place" du lecteur, tout comme le dessin.J’ai entendu certains dire : "Ce n’est plus du Cabanes !" Vous pouvez comprendre ce genre de réaction ?Bellagamba représente une progression dans mon travail. J’ai dessiné dans l’immédiateté, en dégraissant, il n’y a que du maigre et puis l’os. Retrouver la saveur du déjà goûté et aimé, c’est un réflexe naturel en tant que lecteur. Mais évoluer, changer, se surprendre, est tout aussi naturel pour un auteur.Et vous, Patrick, quel effet cela vous fait-il de voir votre univers s’animer ainsi ?PC : C’est intimidant et pas du tout réducteur comme on dit à TF1.Max, est-ce que, avec Patrick, vous vous êtes heurtés au syndrome du romancier du genre : "Alors là, coco, tu mets une foule de 5000 personnes au pied de Notre-Dame-de-la-Garde" ?De toute façon, il y a déjà tellement de boulot à placer correctement un nez au milieu d’une figure, sans parler des mains et puis des pieds, et je ne parle pas des oreilles dont le problème n’a jamais été réglé (tous mes amis dessinateurs le savent !) que l’excessif en devient risible.Paraissant également ce mois-ci (chez Dargaud), il y a La Bonne Vie, la nouvelle "Correspondance de Christin" (voir ci-dessous). Là, Max, vous donnez libre cours à votre veine d’illustrateur. C’est quoi La Bonne vie ?La Bonne vie, c’est les hauts, les bas, les changements, les avatars, les petits bonheurs simples et les petites pathologies banlieusardes, une douce inquiétude.Vos rapports professionnels avec Pierre Christin sont-ils très différents de ceux que vous avez avec Patrick Cauvin ?Je ne travaille qu’avec les stars, bien sûr. Mais il ne faut pas qu’elles me fassent trop chier non plus, et pour ça, Pierre et Patrick sont du bon côté de la rivière comme disait le père du "Motorcycle boy" dans Rumble fish de Coppola, si vous voyez ce que je veux dire. On s’estime, donc on se fait confiance et puis chacun fait le maximum pour que la cuisine soit bonne.Comment se fait-il, Patrick Cauvin, que ce Bellagamba, par ailleurs album délicieux, paraisse chez Casterman, alors que celui qui vous interviewe vous aime depuis si longtemps et que lui travaille chez Dargaud…PC : Comme a failli le chanter Edith Piaf : il arrive que la vie sépare professionnellement ceux qui s’aiment…G.V.

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