Confidences du maître des Rapaces

Par l'équipe Dargaud

Quatrième volume. Boucle bouclée ? Conclusion ? Apothéose ? Nouveau départ ? Exit Drago et Camilla ; passage de relais à Aznar Akeba et Vicky Lenore. Les pièces du puzzle, éparpillées dans les trois premiers volumes, s'entremêlent comme par enchantement et avec une portée dramatique manigancée par Jean Dufaux. Qui a déjà semé les fleurs vénéneuses des épisodes futurs. Oui, un cycle de quatre épisodes arrive à sa conclusion. Non, les Rapaces ne désarment pas ; ils donnent l'impression de se désactiver un instant. Pour mieux porter les coups là où leurs victimes les attendent le moins. Un nouveau cycle est prêt à s'enclencher.






"Quand j'entreprends un nouveau thème, je sais très précisément où je veux arriver." Hé ! Jean Dufaux nous révèle ses secrets de fabrication ! "Ainsi, les deux personnages les plus visibles du premier cycle de Rapaces, Drago et Camilla, devaient assurer, dès le troisième tome, une passation de pouvoirs aux deux nouveaux Rapaces, Aznar Akeba et Vicky. Il s'agit plus d'un glissement que d'une succession".



"Je pose les grands carrefours du scénario dès le départ, puis je multiplie les pistes. Dans un cycle interviennent ainsi plusieurs matrices, envisagées dès la conception du scénario. Avant d'aborder Rapaces, nous nous sommes rencontrés plusieurs fois, Enrico Marini et moi. Nous avons creusé le sujet et l'avons littéralement déshabillé, un peu comme si on retournait toutes les cartes d'un jeu avant de les poser, face cachée, sur la table, et entamer une partie dans laquelle le hasard semblerait tenir tête aux joueurs. Mais le vrai maître du jeu reste celui ou ceux qui ont vu les cartes et connaissent leurs emplacements respectifs, le moment où elles vont apparaître et perturber un déroulement qui paraît logique."



"Restent les impondérables, ou plus exactement, les espaces, les issues, les fuites que l'on se ménage. Car c'est bien d'un jeu qu'il s'agit – avec le lecteur ! Il faut l'amener au point où il croit avoir percé les rouages de pensée du scénariste et ouvrir alors la porte dérobée par laquelle on le propulse sur une autre piste dont il n'avait pas idée. C'est, à mon sens, la seule manière aujourd'hui de rendre un scénario intéressant puisque toutes les structures dramatiques ont été inventées ; seule la dramaturgie sauve la mise."



"Au rayon des impondérables, je classe les auteurs eux-mêmes. Quand il collabore avec un dessinateur aussi talentueux que Marini, le scénariste ne peut rester figé dans ses certitudes. En dépit des discussions préparatoires, le scénario se modifie dans sa superstructure – cela ne remet pas vraiment en question la ligne de force narrative, mais, comme au théâtre, on joue sur les éclairages, sur l'importance donnée à un rôle. Les comédiens peuvent transcender un rôle ; leur jeu (encore !), mettre en évidence un protagoniste, voire éclipser un rôle que l'on croyait central."



"Il en va de même avec quelqu'un comme Marini. Lorsque je vois se dérouler les pages qu'il me faxe, je reste ébloui par sa virtuosité. Enrico adore dessiner les corps, leur donner vie, et la pétulance de son trait, la fougue de sa mise en image éclairent le scénariste. Cela devient évident qu'il faut donner plus de lumière sur tel personnage secondaire, puisque Marini lui a donné une sorte de force irrésistible."



"Ce sont cela, les espaces et les fuites que je me ménage dans le scénario-cadre établi dès le départ. C'est la vie d'un scénario. Une vie harmonieuse, car basée sur la confiance entre l'homme au dessin et celui qui assure l'écriture. La confiance dans le professionnalisme de l'un et de l'autre. "Même si le scénario ne se déploie jamais en roue libre, il faut prendre en compte l'alchimie mystérieuse des neurones ou de quelque chose d'autre, qui reste à identifier – et j'espère que cela n'arrivera jamais (quel ennui, une imagination mise en équations…). Je veux parler des coups de projecteurs qui, en cours de rédaction, ouvrent des espaces semblables aux pièces d'une grande maison que l'on pas visitées depuis des années : on s'y fait une fête de découvertes. Ainsi, le flic Spiaggi, personnage secondaire s'il en est, a pris de la carrure… et du galon, puisqu'il est devenu chef de la police."



"Je pourrais parfaitement écrire les quatre tomes de Rapaces d'une seule traite. Je ne le fais pas : ce serait très angoissant pour le dessinateur et très regrettable pour cette vie du scénario, enrichie et nourrie de la vision graphique de Marini. A l'issue de ce premier cycle, j'envisage très bien dans quelle direction se dirigeront les prochains épisodes. Les jalons ont déjà été posés. Rien n'empêche que l'un des Rapaces disparus ne ressuscite ; rien n'empêche qu'ils voyagent dans le temps. Je ne dis pas que cela arrivera : ce sont de nouvelles éventualités à explorer, contenues dans le point alpha, initialisation de l'univers des Rapaces, et le point oméga, qui signifiera que tout aura été dit sur cette communauté. Quand cela arrivera-t-il ? A l'issue de deux, trois ou quatre cycles ? Cette carte-là, je ne l'ai pas retournée avant de commencer le jeu !"


Propos recueillis par Alain De Kuyssche

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